La Nouvelle Femme, le film sur Maria Montessori

« La Nouvelle Femme« , réalisé par Léa Todorov et sorti en mars 2024, s’intéresse à la vie de Maria Montessori, une figure emblématique de l’éducation du début du XXe siècle. Ce film biographique se distingue par sa perspective novatrice, soulignant non seulement les contributions de Montessori à l’éducation, mais aussi les défis personnels auxquels elle a été confrontée en tant que femme dans un monde dominé par les hommes.

Le film plonge dans la complexité de sa vie, révélant des aspects souvent occultés de sa biographie, tout en explorant les thèmes de la maternité, de la féminité, et de l’indépendance. À travers ce prisme, Todorov ne se contente pas de célébrer Montessori en tant que pionnière pédagogique, mais en fait également une icône féministe.

Objectif du film :
Léa Todorov a clairement exprimé son intention de magnifier la figure de Montessori tout en soulignant son humanité et ses luttes personnelles. Le film cherche à offrir une vision plus complète de Montessori, non seulement en tant qu’éducatrice révolutionnaire, mais aussi en tant que femme confrontée à des choix difficiles dans sa vie personnelle, en particulier autour de la maternité et de son rôle dans une société patriarcale​.

Synopsis et analyse narrative

Le film se déroule principalement entre Paris et Rome au début du XXe siècle. Il raconte l’histoire de Lili d’Alengy, une courtisane parisienne respectée, qui cache un lourd secret : sa fille Tina, née avec une déficience, qu’elle dissimule pour préserver sa carrière et sa réputation. Lili est forcée de quitter Paris pour Rome où elle fait la rencontre de Maria Montessori. À cette époque, Montessori développe une méthode éducative novatrice destinée aux enfants qualifiés de « déficients », une approche qui deviendra plus tard mondialement reconnue sous le nom de méthode Montessori. Le film suit l’évolution de la relation entre Lili et Maria, deux femmes confrontées à des défis similaires dans des contextes différents, et comment elles trouvent en l’autre un soutien pour surmonter les obstacles qui se dressent sur leur chemin​.

Thèmes centraux :
L’histoire explore des thèmes variés et profonds, notamment la maternité et les dilemmes qu’elle impose aux femmes, surtout dans une société patriarcale. Lili et Maria sont toutes deux des mères confrontées à des choix difficiles : Lili doit sacrifier sa carrière pour s’occuper de sa fille, tandis que Maria est confrontée à la décision de choisir entre sa carrière et son propre enfant né hors mariage. Par ailleurs, le film aborde la question de la féminité et de la lutte pour la reconnaissance professionnelle dans un monde dominé par les hommes. L’éducation et la manière dont elle peut être un outil d’émancipation, tant pour les enfants que pour les femmes, est un autre thème central du film​.

Contexte historique et social

Maria Montessori a évolué dans une Italie du début du XXe siècle marquée par de profondes inégalités sociales et un système éducatif rigide. En tant que l’une des premières femmes médecins d’Italie, elle a dû naviguer dans un environnement professionnel dominé par les hommes. Ce contexte rend ses accomplissements encore plus impressionnants, car elle a réussi non seulement à développer une nouvelle approche pédagogique, mais aussi à faire accepter ses idées dans un monde réticent à tout changement, particulièrement lorsque ces idées viennent d’une femme.

Le film illustre de manière poignante les difficultés auxquelles étaient confrontées les femmes de l’époque. À travers le personnage de Lili, Todorov montre comment les femmes devaient souvent sacrifier leurs ambitions personnelles pour se conformer aux attentes sociales. D’un autre côté, Maria Montessori, bien qu’étant une professionnelle accomplie, est également confrontée à des choix douloureux liés à son rôle de mère non mariée. Le film souligne ainsi l’universalité des luttes des femmes pour s’émanciper, qu’elles soient courtisanes ou médecins​.

La réalisation et la direction artistique

Mise en scène et esthétique :
L’esthétique du film est soigneusement travaillée pour refléter l’époque historique tout en renforçant les émotions des personnages. La direction artistique, sous la houlette de Pascale Consigny pour les décors et d’Agnès Noden pour les costumes, recrée avec précision l’atmosphère de Paris et de Rome au début du XXe siècle. Les choix de Sébastien Goepfert à la cinématographie soulignent la dualité entre les mondes publics et privés des personnages, souvent en jouant avec les contrastes entre lumière et ombre pour symboliser leurs conflits intérieurs​.

Casting :
Les performances des acteurs sont un autre point fort du film. Jasmine Trinca, dans le rôle de Maria Montessori, incarne avec profondeur et nuance une femme tiraillée entre ses obligations professionnelles et personnelles. Leïla Bekhti, qui interprète Lili d’Alengy, apporte une complexité émotionnelle à un personnage qui doit naviguer entre son rôle public et ses réalités privées. Leur chimie à l’écran est palpable, rendant crédible l’évolution de leur relation tout au long du film. Les rôles secondaires, interprétés par des acteurs comme Pietro Ragusa et Nancy Huston, ajoutent des couches supplémentaires à l’histoire, enrichissant ainsi la trame narrative​.

Réception critique

Accueil en France et à l’international :
À sa sortie, « La Nouvelle Femme » a suscité des réactions contrastées mais globalement positives. En France, les critiques ont salué la performance des acteurs, en particulier celle de Jasmine Trinca, ainsi que la manière dont le film traite de thèmes complexes comme la maternité et le féminisme. À l’international, le film a été présenté dans plusieurs festivals de cinéma, où il a été accueilli chaleureusement. Le film a été sélectionné dans des sections prestigieuses comme Cinemed à Montpellier et le Festa do Cinema Italiano, ce qui témoigne de son impact au-delà des frontières françaises​.

Points de vue divergents :
Toutefois, certains critiques ont pointé du doigt le traitement peut-être trop romancé de la vie de Montessori, arguant que cela pourrait nuire à la perception de son héritage historique. D’autres ont souligné que le film, en se concentrant sur les aspects les plus personnels de la vie de Montessori, aurait pu négliger certaines de ses contributions pédagogiques essentielles. Ces critiques, bien qu’isolées, soulignent l’équilibre délicat que Todorov a dû maintenir entre fidélité historique et création dramatique​.

Impact et héritage

L’héritage de Maria Montessori :
Le film offre une nouvelle perspective sur l’héritage de Montessori, souvent réduite à sa méthode pédagogique. En mettant en lumière ses défis personnels et ses choix de vie, Todorov humanise Montessori, la rendant plus accessible au public moderne. Le film rappelle également l’importance de sa contribution non seulement à l’éducation mais aussi à la reconnaissance des droits des femmes et des enfants dans une société où ces questions étaient encore marginales​.

Influence du film sur le public moderne :
« La Nouvelle Femme » résonne particulièrement dans le contexte actuel où les débats sur l’éducation inclusive, les droits des femmes et l’autonomisation des mères sont plus pertinents que jamais. Le film invite le public à réfléchir sur la manière dont les choix de Montessori, souvent difficiles et controversés à l’époque, continuent d’influencer notre compréhension de l’éducation et de la place des femmes dans la société. Il pose également des questions sur les sacrifices que les femmes doivent encore faire pour concilier vie professionnelle et vie privée​.

Pour résumé, « La Nouvelle Femme » est une œuvre qui combine habilement biographie et fiction pour offrir une vision nuancée de Maria Montessori. Le film est à la fois un hommage à son héritage et une exploration des défis personnels auxquels elle a été confrontée. La performance des acteurs, la direction artistique, et le traitement des thèmes font de ce film une œuvre marquante dans le paysage cinématographique de 2024.